Mot de l’éditeur :
«Je montrerai tout. Mon coeur, mes émotions. Vert – rouge – jaune – bleu – violet. Haine -amour – rire – peur – tendresse.»
Niki hait l’arête, la ligne droite, la symétrie. A l’inverse, l’ondulation, la courbe, le rond ont le pouvoir de déliter la moindre de ses tensions. Délayer les amertumes, délier les pliures : un langage architectural qui parlerait la langue des berceuses. Aussi vit-elle sa visite au parc Güell comme une véritable épiphanie. Tout ici la transporte, des vagues pierrées à leur miroitement singulier. Trencadis est le mot qu’elle retient : une mosaïque d’éclats de céramique et de verre. De la vieille vaisselle cassée recyclée pour faire simple.
Si je comprends bien, se dit-elle, le trencadis est un cheminement bref de la dislocation vers la reconstruction. Concasser l’unique pour épanouir le composite. Broyer le figé pour enfanter le mouvement. Briser le quotidien pour inventer le féérique. Elle rit : ce devrait être presque un art de vie, non ?
«J’aime l’imaginaire comme un moine peut aimer Dieu.»
Biographie de l’auteur :
Originaire de Valenciennes, Caroline Deyns est l’auteure de Tour de plume et de Perdu, le jour où nous n’avons pas dansé (Philippe Rey, 2011 et 2015). Elle est agrégée de lettres et réside à Besançon.
Notre avis :
J’ai été captivée par ce roman biographique au style très vivant et à la recherche extrêmement documentée. Cette évocation d’une artiste singulière, est très réussie. « Trencadis » éclaire de manière inédite, soignée et esthétique, me semble-t-il, la figure de Niki de Saint-Phalle ainsi que son oeuvre.
Caroline Deyns comme dans une mosaïque reconstitue les épisodes marquants du parcours personnel et professionnel de son héroïne.
L’événement qui déclenchera sa vie d’artiste est son internement en hôpital psychiatrique à la suite d’une grave dépression nerveuse survenue à l’âge de 22 ans. C’est là qu’elle commence véritablement à peindre et utilise l’Art comme moyen cathartique et de guérison. Elle concevra la création et le geste artistique comme émancipateurs.
En 1994, Niki révélera un événement traumatisant dans son livre illustré « Mon Secret » : le viol par son père lorsqu’elle avait 11 ans.
Des blessures de sa vie, Niki de Saint-Phalle tire un art coloré et lumineux, proposant la liberté et l’expression des sentiments. Ses grandes sculptures de polyester, les Nanas, sont ces symboles de la féminité et de la joie de vivre retrouvée.
Comme dans “Exercices de style” de Raymond Queneau l’envie de découvrir la nouvelle trouvaille graphique ou littéraire de l’autrice est très forte.
Le narrateur change continuellement, la présentation varie et les citations sont nombreuses avec des chapitres courts d’une efficacité et originalité saisissantes.
L’envie de visiter Le Jardin des Tarots avec ses superbes installations en Toscane sera forte après cette lecture et ses arcanes vous seront dévoilés dans le livre.
Ce texte est un hommage précieux et sensible à Niki de Saint-Phalle.
Je recommande vivement cette histoire brillante et poétique.
Un énorme coup de cœur.
❤️❤️❤️❤️❤️(❤️)
Quidam Editeur